Les mariages avaient lieu ordinairement le mardi, de Pâques à la St Jean et de Septembre à la Toussaint
La veille du mariage, quelques invités et surtout les jeunes venaient décorer la salle. Ils pendaient des draps tout autour de la (grange) salle qu’ils décoraient de roses mais aussi de verdure.
Certains allaient planter des branches de houx, décorées de roses, au bout du chemin menant à la ferme. On suspendait une couronne faite de verdure et de roses au dessus de l’entrée du chemin, à l’entrée de la grange, à
l’entrée de la maison...La fête commençait : on goûtait le vin de la noce...
Le garçon d’honneur et la fille d’honneur aidés par les familles organisaient le cortège et décidaient des couples de “cavalier et de cavalière”... Important, cela pouvait décider
de futurs mariages.
Pendant ce temps, la cuisinière préparait les repas qui, s’ils étaient simples, étaient plutôt copieux...Souvent à la ferme, on tuait le veau et/ou le mouton (ce qui était
un luxe; à une noce on a tué jusqu’à 15 dindes) . L’eau qui servait à la vaisselle venait de la “tonne”: l’eau était puisée soit à la rivière, soit dans une carrière... Le
feu était entretenu soit dans la grande cuisine, soit dans le fournil où des chaudrons étaient remplis d’eau en permanence. Ce soir-là, on mangeait une bonne soupe grasse, les abats du veau ou du mouton
Le jour, Les mariés s’habillaient , chacun chez ses parents.
La mariée enfilait jupons et robe, aidée par sa couturière, coiffeuse, et sa mère ou sa grande soeur... La coiffe, plus tard le voile, était ajustée et
bien fixée...On lui remettait une gerbe de fleurs qui, à une certaine époque, était fort importante. Le marié avait alors le droit de découvrir l’objet de son amour.
Le marié était habillé d’un complet (trois-pièces, quand on avait un peu d’argent) de couleur plutôt
sombre. La chemise blanche (à tibis) avait souvent un col dur. (qui faisait mal pour peu que l’on transpirât)
Le cortège se formait à partir de la maison de la mariée et l’on partait à
pied à la mairie Les musiciens en tête (Chaine-Maillard), suivis de petits enfants (les filleuls des mariés étaient particulièrement concernés), puis de la mariée au bras de son père, ( sa mère se trouvait en fin de cortège au
bras du beau-père; le marié était au bras de sa mère) du garçon et de la fille d’honneur, parrains et marraines et enfin des invités
Au long de la route , on trouvait des bouquets disposés sur une chaise. A côté une assiette... Si le bouquet était offert, on était invité à déposer de l’argent dans l’assiette
lequel irait ensuite en cadeau à la mariée.
A l’entrée de l’église, le marié rejoignait la mariée. Celle-ci, si elle était “enfant de Marie” remettait son écharpe à Mr le Curé (elle allait perdre sa virginité ! ).
Dans l’église, la grandeur du tapis, sur lequel s’avançaient les mariés était fonction de la “classe” du mariage : 1° ou 2°... Les enfants du
cortège qui précédaient la marié étaient généralement désignés pour faire la quête avec le garçon et la fille d’honneur.
A la sortie de la cérémonie, pas de vin d’honneur. Si la mariée faisait partie des chanteuses de la
chorale paroissiale, elle montait, en cortège restreint, au “couvent” où une petite réception était organisée .Elle recevait inévitablement de la bonne mère et des petits cadeaux de ses amies Les
autres “gens de la noce” faisaient une tournée des bistrots familiers et/ou amis. Cela commençait à mettre de l’ambiance. Puis le cortège se reformait, la marié au bras de son mari, musiciens en tête
, pour partir à la salle de mariage.
Les cuisinières et les serveurs (ses) accueillaient le cortège en
chantant “ Trempons la soupe...” Les mariés s’installaient à la table d’honneur ou les rejoignaient pères et mères, les grands-parents,
parrains et marraines...Toujours des personnes “dignes”. En face des mariés, le garçon et fille d’honneur qui auraient pour charge d’animer les repas : faire chanter, jouer, danser...
En effet, les repas étaient longs parce que les menus étaient
copieux (voir ci-dessus) .
Les chanteurs qui ne terminaient pas leurs chansons, étaient conviés à boire ...A la fin du chant, comme récompense, ils recevaient les baisers du sexe opposé...Et le dernier
qui embrassait avait pour gage de chanter à son tour..En fin de repas, on pouvait assister “aux vêpres de la mariée”. C’était une parodie de cérémonie religieuse avec “curé, enfants de choeur...”
qui détaillait les attributs de la mariée en faisant des allusions souvent grivoises :
“A la mariée quo li fo ti ? Une belle tchulotte aussi...”
Entre les deux repas, les tables sur tréteaux étaient dégagées pour permettre aux danseurs de
digérer. En attendant que la salle soit prête, des jeux s’installaient dans “l’aire” :jeu du balai (élimination des danseurs un par un ( sur le mode des chaises musicales), jeu du tapis... . Au bal ,
c’était l’occasion de voir les danses traditionnelles : quadrille, gigouillette...mais aussi pour certains cavaliers ou cavalières de faire plus ample connaissance et de fixer des rendez-vous...Vers neuf
heures du soir , on remettait ça. Un repas tout aussi copieux avec potage...langue de boeuf...
On dansait à nouveau. Sur le coup de minuit -une heure du matin, c’était la danse de la brioche . On la mangeait pour “caler les verres
de vin ou de café” pour durer jusqu’au petit matin. Les mariés s’esquivaient sans se faire remarquer. car le jeu consistait alors de les retrouver pour leur “porter la soupe”. (une soupe grasse, souvent,
avec des légumes évoquant les organes génitaux, offerte dans un pot de chambre : ce n’était pas toujours d’un humour très fin).
Le lendemain, la famille proche et les jeunes gens venaient déjeuner,
la bouche pâteuse...Quand la famille avait les moyens elle offrait des huitres. Tout en chantant, en jouant, en faisant des tours à la barrique, on remettait les choses en place. Si l’un des mariés était le dernier
d’une fratrie : les parents “cassaient les pots”. Des pots de dragées, mais aussi de farine, d’eau,...étaient suspendus à un câble. Et les parents, les yeux bandés devaient essayer de les casser pour manger
les dragées. Dans le même cas, une autre tradition : le tas de paille à faire brûler. par la mère de famille qui n’avait plus d’enfants à marier.
Elle attisait le feu pour qu’il s’éteigne au plus vite...si dans l’autre famille, au contraire, il y avait encore des enfants à marier, les parents essayaient de détruire le feu...
La barrique se vidait :
- “I nous irons, i nous irons
- Quand la barrique, quand la barrique
- Quand la barrique sera la chu en haouw....
A midi, on mangeait les restes avant de partir...La barrique était vide.
Récit basé sur le témoignage de Mme Jeanne CANTEREAU, 94 ans
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